L’intelligence artificielle (IA) va transformer en profondeur notre vie, notre travail et notre société. Assistants vocaux, superordinateurs, robots industriels et maintenant voitures autonomes sont au centre de l’actualité quotidienne. En 2020, le chiffre d’affaires mondial des applications commerciales dans le domaine de l’IA est estimé à environ 4,8 milliards de dollars. (Source : Statista)
La mise en place d’une IA rentable et sûre, en accord avec les bases éthiques de la société, impose toutefois une réflexion de fond. Il est indispensable, d’une part, de prendre en compte les écosystèmes technologiques existants, et, d’autre part, de mettre en œuvre les modifications culturelles nécessaires et de créer un cadre règlementaire et normatif générateur de confiance.
L’intelligence artificielle en Allemagne
En juillet 2018, l’Allemagne a présenté un document de réflexion pour préparer sa stratégie IA nationale. Le pays veut s’imposer comme un précurseur mondial de l’exploration et de l’utilisation de l’intelligence artificielle grâce à une gestion responsable de ces systèmes dans l’économie, les sciences et l’administration. Le gouvernement, sous l’égide des trois ministères (travail et affaires sociales, économie et énergie, recherche et développement), a identifié les principaux domaines d’action, mesures et règlementations pour un futur label de qualité mondialement reconnu : KI (IA) Made in Germany.
La Sarre est déjà très engagée dans le domaine de l’intelligence artificielle. A Sarrebruck, un campus pour créateurs de dix hectares est actuellement en projet. Il sera situé à proximité du centre pour la sécurité informatique Helmholtz-Zentrum für IT-Sicherheit (Cispa) et du centre de recherche allemand pour l’intelligence artificielle Deutsches Forschungszentrums für Künstliche Intelligenz (DFKI). Le DFKI compte parmi les plus importants Centers of Excellence.
Trois milliards d’euros pour la stratégie IA en Allemagne
Les pays de l’Union européenne se sont engagés à mettre en commun des ressources pour développer une approche commune de l’intelligence artificielle et contrer les leaders asiatiques et américains. D’ici 2025, l’Allemagne va investir environ trois milliards d’euros pour la recherche en IA, la France environ 1,5 milliard d’euros jusqu’en 2023 et la Commission européenne, près d’un milliard d’euros par an. Les autres pays membres doivent établir des plans avec des objectifs de financement concrets.
Grâce à l’utilisation de l’IA en Allemagne, l’agence Accenture prévoit une augmentation de la croissance économique annuelle de 3 % jusqu’en 2035. C’est plus du double que le scénario de base avec un taux de croissance de 1,4 % par an. L’IA devrait augmenter de 29 % la productivité des employés en Allemagne, car de nombreuses procédures de fonctionnement pourront être plus efficientes. Les collaborateurs pourront notamment se concentrer sur des tâches à forte valeur ajoutée. La création en valeur ajoutée brute se monte à presque un billion d’euros jusqu’en 2035.
Les algorithmes intelligents restent toutefois marginaux dans l’économie. D’après un récent sondage du Boston Consulting Group (BCG), seulement 20 % des entreprises allemandes utilisent l’IA, 30 % sont encore dans une phase de développement et 50 % ne sont que spectatrices.
L’intelligence artificielle en France
En France, l’intelligence artificielle fait partie des secteurs d’avenir. En 2018, le président français Emmanuel Macron a présenté un plan d’investissement de 1,5 milliard d’euros pour soutenir le développement de l’IA. L’objectif est d’amener la France au niveau des leaders mondiaux. Le pays dispose déjà de bonnes connaissances théoriques, mais aucune entreprise n’est encore dominante dans ce domaine.
La stratégie, baptisée Artificial Intelligence (AI) for Humanity, s’articule autour de trois thèmes. La France doit d’abord être attractive pour le personnel qualifié et les talents, y compris à l’étranger. La recherche doit ensuite être encouragée par la mise à disposition de données. Le pays va, enfin, initier un débat international sur les aspects éthiques de l’IA.
Selon Le Hub Bpifrance, l’intelligence artificielle représenterait en France un marché de 11 milliards d’euros en 2024, alimenté par une croissance de 53 % entre 2015 et 2020. La productivité en France pourrait ainsi augmenter jusqu’à 20 %. La France se situe à la septième place au nombre de start-ups spécialisées en l’intelligence artificielle. Avec 109 entreprises, la France se place juste devant l’Allemagne au classement.
Resserrer les liens entre les instituts de recherche allemands et français
Quatre instituts de recherche à Grenoble, Nice, Paris et Toulouse vont se spécialiser en Instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle et recevront des subventions pour assurer leur mutation. Quarante chaires de recherche et d’enseignement en IA seront créées pour compléter ce dispositif. Le nombre de doctorants doit, par ailleurs, être doublé pour atteindre cinq cents par an.
La coopération avec l’Allemagne sera également élargie grâce à des concours de projets, subventionnés à hauteur de trois millions d’euros par an. Les instituts de recherche leader sur l’IA, comme le Deutsche Forschungszentrum für Künstliche Intelligenz situé à Kaiserlautern et à Sarrebruck, devront travailler encore plus étroitement avec, par exemple, leur collègues de Toulouse ou de Grenoble. L’enjeu est de retenir en Europe les jeunes chercheurs de talent avec les programmes doctorat et Postdoc de la Commission européenne. Les plus petites entreprises auront également accès aux technologies de l’IA au travers des Digital Innovation Hubs.
Auteur : Jitka MENCL-GOUDIER
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